mardi 21
23:00

Action : A Hiver Mou, Mardi Gras.

mardi 21 février 2012 à 23h

Action : A Hiver Mou, Mardi Gras.

A Hiver Mou, Mardi Gras.

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mardi 21 fevrier 2012 23:00

Le mouvement des "Indignés", à Bruxelles, est mort.

Il est mort en tant que mouvement.

Si, depuis le printemps et à quelques occasions plus récentes, il fut souvent opportun que des menées, des paroles et des actions surgissent sous couvert de cette appellation encore peu contrôlée et suffisamment floue, il semble aujourd'hui ne subsister dans celle-ci qu'un mou et encombrant fardeau.

Mort en tant que mouvement, il se survit sous la forme d'un proto-parti, avec ses membres, ses chartes, sa police. De geste public et rejoignable, de forme réappropriable et retraduisible, il s'est figé en identité, en organisation, avec ses experts, ses salles de réunions, ses communiqués officiels.

Le passage, en octobre, d'une grosse poign(é)e d'indignés professionnels mandatés (pour la plupart fraîchement débarqués en ville) a fait beaucoup pour la ruine de ce qui, à Bruxelles, avait échappé à la sclérose constatée en de nombreux autres endroits - lorsque, derrière un geste qui laissait d'abord entrevoir que "les indignés, c'est tout le monde" apparaissait tous les mots d'ordre et la liste des preuves à fournir pour "en être" - et permis de bien belles choses.

Ils ont enterré les assemblées au sous-sol, réduit les vives questions de mouvement à une abjecte histoire de gestion, et littéralement fliqué tous ceux qui ne suivaient pas dans le rang.

Et ces connards invoquent les "pacifiques révolutions arabes"!...

Leurs collègues restés à Bruxelles se chargent maintenant d'étouffer tant qu'ils peuvent tout reste de joie et de puissance que contenait encore - quelque part, malgré lui - le mouvement des "Indignés".

Bien. Très bien. Ne le déplorons pas. Laissons-les à leur faillite. Faisons de la place à autre chose.

Car, d'un autre côté, le mot de passe "Indignés" a été le siège - ou, disons, le lit - d'autres types de rencontres et de complicités, entre celles et ceux qui se font d'autres idées de la vie, qui partagent d'autres récits et se sentent d'autres devenirs que celui de politicien freelance polygestionnaire.

Depuis les échos de cet élan-là, depuis ces tisons de joie partagée, peut-être pouvons-nous entrevoir avec confiance et enthousiasme ce que peuvent augurer d'autres "noeuds" qui lieraient, en des moments et en des lieux plus ou moins nombreux, de telles dispositions.

Ceci est un appel à saisir un tel moment:

Cette année, mardi gras surgit (plus qu'il ne tombe) le 21 février. Rien d'inquiétant ni de particulièrement bouleversant, si ce n'est l'occasion d'invitations croisées à, d'une part, "retrousser l'époque" - 21.02.2012: la fin d'un monde - et, d'autre part, une manière d'y oeuvrer: LE CARNAVAL - de nuit.

Dans de nombreuses autres villes, des mouvements autodéclarés "d'occupation" ont vu le jour et, pour certains, comme en Amérique-du-Nord, duré plusieurs mois, malgré un dispositif répressif (policier et médiatique) bien plus zélé qu'en cette douce capitale.

Ils occupent des parcs, des places, des ports, des villes; s'en ramassent plein sur le coin de la gueule et reviennent plus déterminés encore; prennent la rue masqués et casqués, matériellement préparés à et pour l'offensive, et répondent aux charges...

Ils ont l'air de plutôt bien se marrer.

Or, si l'occupation de l'espace physique et mental peut s'avérer tactiquement judicieuse selon les circonstances, elle échoue partout où elle ne parvient pas à se transformer en moment de libération.

Note: A Rome, le 15 octobre 2011 (alors qu'à Bruxelles l'indignation polie et policée triomphait sans partage), une certaine manière de libérer l'espace et les corps battait son plein...

L'État, sa police et autres institutions sont des forces d'occupation.

La sémiocratie marchande, sa publicité et son imaginaire sont des forces d'occupation.

Elles occupent l'espace, les corps, les âmes; c'est-à-dire ce qu'elles ont dans le même geste constitué comme "territoire" et "population".

Sur ce terrain-là, elles restent principalement invaincues, et comme nous savons le conflit asymétrique, c'est une toute autre stratégie qu'il nous faut envisager. Aussi, s'agit-il pour nous de libérer les espaces, les corps, les âmes; de faire advenir les conditions d'une telle libération. Non pas pour y faire exister ce qui serait une bonne occupation, y imprimer une juste texture, mais pour arracher à ces forces - qui assurent en tout temps et en tout lieu une circulation maximale de l'ennui, de la peur et, en dernier recours, du néant - des espaces et des moments où s'élabore dans toute son épaisseur autant qu'elle circule intensément une multiplicité de désirs, d'affects, d'expérimentations et de rencontres, incompatible avec le régime existentiel dominant.

D'un côté l'injonction à la visibilité, la transparence; de l'autre, le cadre des manières autorisées de visibilité.

En dehors de ça, le retrait offensif, l'opacité; les rencontres de nuit, quand tous les chats sont gris - à leur manière.

Un carnaval où les masques se superposent, les identités se troublent, les gestes se mêlent; où les corps surgissants, errants, fuyants, se font, petit à petit, de plus en plus intensément, une nouvelle peau dans les rues de la ville. Peut-être les places seront-elles témoin, entre la free party, l'émeute et le sabbat sorcier, d'une présence commune dont elles sont encore nostalgiques.

Le soir du 21 février, alors qu'une grande partie de la ville ira se coucher, nous sortirons rejoindre l'autre, celle qui ne dort jamais, pour lui tenir compagnie - à notre manière...

Trouvons-nous.

Source : http://bxl.indymedia.org/events/3591